Les médias n’ont pas encore annoncé la mort de la laïcité française, assassinée le 16 avril 2009 par un certain Nicolas Sarkozy

Posté le 30 avril 2009 – 22:50 | par Yannick Serrano | 

coup d'EtatEpisode 6 : Mettre fin aux socles républicains…
Pour les lecteurs assidus, voici malheureusement l’épisode 6 des atteintes dramatiques à notre république démocratique et laïque. J’aurais préféré ne pas avoir à écrire celui-ci… Les nouveaux lecteurs pourront s’ils le souhaitent se plonger dans les billets précédents ou les archives pour trouver ce qui finit par constituer bien plus que des “abus de pouvoir” comme les appelle encore pudiquement François Bayrou et comme le qualifient de façon  encore insuffisamment ferme nos dirigeants socialistes, “la dérive autoritaire. Il nous faudra bien l’admettre et le dénoncer clairement à un moment donné : la France a changé de régime.
Petit rappel historique : Immédiatement, après avoir épuré de sa composante cléricale, le conseil supérieur de l’Instruction publique en votant la loi du 27 février 1880, la majorité républicaine issue des élections des 14 et 28 octobre 1877 et le ministre Jules Ferry portaient un nouveau coup à la loi Falloux du 15 mars 1850 modifiée par celle du 12 juillet 1875, adoptées l’une et l’autre par des assemblées monarchistes. Confiée depuis cinq ans à des jurys mixtes comprenant des membres du clergé, la collation des grades universitaires revenait désormais à l’Etat et à lui seul, conformément à la loi du 18 mars 1880.
Jules Ferry clama alors avec force lors de la première séance du conseil supérieur laïcisé, que l’Université devenait « un corps vivant, organisé et libre. » Ce principe républicain essentiel fut tout le temps réaffirmé depuis. L’alinéa premier de l’article L. 613-1 du code de l’éducation, dans sa version issue de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 actuellement en vigueur, décrit clairement que « L’Etat a le monopole de la collation des grades et titres universitaires. »
Le contexte :
Après la mise à bas du pouvoir législatif, la rupture de l’indépendance du pouvoir judiciaire, la casse de l’équité fiscale,  l’instauration de la solidarité inversée (les pauvres en faveur des riches avec les  franchises médicales au profit  du bouclier fiscal),  un des derniers piliers de la République vient d’être abattu : la laïcité.
Cela au moment même où une série de « contre-réformes », toutes adoptées par décret, sans passer par la représentation nationale ou le suffrage populaire, contre l’avis de l’ensemble de la communauté universitaire, menacent de destruction l’université française publique et laïque et tout son système de formation non marchand.
Comme quoi les choses que l’on croit les plus fortes et les plus durablement acquises peuvent être parfois défaites d’un petit trait de plume et avec le silence complice de certains médias…
Les faits :
Par l’effet d’un décret simple, la loi Falloux est en partie rétablie. Après en avoir été privée pendant 129 ans, l’église romaine retrouve le pouvoir d’intervenir dans la collation des grades universitaires. Ce fait intolérable est pourtant passé inaperçu, pas une ligne dans un journal, et plus grave, pas une déclaration d’un dirigeant socialiste ou de gauche. Comme quoi tout fout le camp… Mais ne soyons pas négatifs à ce point, ce blog étant lu par d’éminentes personnalités du journalisme et de la politique, ne doutons pas qu’il s’agissait simplement de contraintes d’assemblage de journaux ou de contraintes d’agenda !
Ainsi par un décret du 16 avril 2009, le président de la République vient, de publier l’accord de Paris du 18 décembre 2008 (lire mon article du 22 décembre 2008) par lequel la France et le Saint-Siège ont entendu décliner au plan bilatéral le processus de Bologne initié par la convention du 11 avril 1997 sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région « Europe », ratifiée le 18 septembre 2000. L’une et l’autre acceptent de reconnaître mutuellement « des périodes d’études, des grades et des diplômes de l’enseignement supérieur délivrés sous l’autorité compétente de l’une des Parties ». Cela semble anodin, et pourtant…
Pour la République française, il s’agit bien sûr des « grades et diplômes délivrés sous l’autorité de l’Etat par les établissements d’enseignement supérieur ». Pour le Saint-Siège sont concernés ceux attribués par « les Universités catholiques, les Facultés ecclésiastiques et les établissements d’enseignement supérieur dûment habilités par le Saint Siège » !
Le protocole additionnel à l’accord de Paris précise donc qu’entrent en particulier dans le champ d’application de ce dernier les diplômes ecclésiastiques de doctorat (niveau doctorat), de licence (niveau « master ») et de baccalauréat (niveau licence) obtenus dans les facultés ecclésiastiques qui, selon la constitution apostolique Sapiensa christiana de 1979, ont notamment pour objet de former des chercheurs, des professeurs d’universités et de séminaires, des chanceliers, des membres de tribunaux ecclésiastiques et d’autres titulaires d’offices, des conseillers d’évêques et de supérieurs religieux.
La ratification, par décret de l’accord du 18 décembre 2008, constitue un coup de force juridique inacceptable, disons le un coup d’Etat éducatif ! Il ne s’agit pas de la simple reconnaissance mutuelle des diplômes délivrés par les systèmes légaux d’enseignement supérieur de deux États liés par une convention internationale.
Au mépris de la laïcité, l’accord de Paris conduit, en effet, la République française à légitimer des titres universitaires attribués par des établissements d’enseignement supérieur catholiques sur son territoire, ou sur le territoire d’autres États ne les reconnaissant pas nécessairement. Il ouvre ainsi une brèche dans le monopole de la collation par l’Etat, des grades universitaires, instituée par la loi du 18 mars 1880.
Ce décret est disons le nettement anticonstitutionnel et il appartenait normalement au gouvernement de saisir le Parlement d’un projet de loi de ratification de l’accord de Paris en application de l’article 53 de la Constitution du 4 octobre 1958. Au lieu de cela, le président de la République a choisi de prendre en catimini un décret pour le faire entrer en vigueur.
L’accord de Paris modifie bien implicitement mais nécessairement « des dispositions de nature législative ». La voie suivie évite donc la discussion du rétablissement partiel de la loi Falloux devant la représentation nationale. Nicolas Sarkozy a délibérément choisi de trahir la république car il ne la respecte pas dans ses fondements. J’espère que mes amis lecteurs, quels que soit leur rôle dans la société saisiront leurs collègues, leurs amis de ce problème qui à n’en pas douter soulèverait un tollé dans l’opinion publique française, pour peu qu’elle en soit informée… Le succès d’un recours devant le Conseil Constitutionnel ne fait pas l’ombre d’un doute, mais je ne suis qu’un petit citoyen de province ! Attendons la suite…
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Dernière mise à jour de cette rubrique le 01/05/2009