Alternatives : la maire installe des paysans

Source : Le Lot en Action de février, par Peyo (Pierre Dudout), mis en ligne le 7 février 2015

Soulatgé, 200 habitants, une commune des Corbières. Comme bien d’autres petits villages ruraux, les paysans sont partis, l’école a fermé et il reste un restaurant. Comme bien d’autres…

Panneau soulatgeChristian Casties, paysan depuis 25 ans prend la mairie et décide que son village ne mourra pas comme d’autres. Il souhaite faire venir des jeunes pour qu’ils s’installent. Et très vite, il se heurte aux limites du modèle d’installation prôné par la FNSEA. Mais alors qu’est ce qui fait que cette commune n’a pas connu la même histoire que les autres ? Depuis 10 ans, une dizaine de jeunes et de moins jeunes sont venus s’installer à Soulatgé. On a voulu comprendre comment la municipalité avait procédé pour en arriver à ce résultat. Nous avons contacté le maire et différents acteurs.

« D’abord, c’est pas simple » On s’en serait douté. « Lors du décès d’un paysan, 17 Ha se sont libérés, très morcelés ». Ce dossier n’aboutit pas tel quel, mais permet de prendre conscience de la nécessité de s’attaquer au problème. Un adjoint, Pierre Berato, paysan bio et membre de l’ADEAR va faciliter la mise en commun de la volonté de la mairie et des compétences de l’association. Tout en sachant faire valoir leurs différences, ils vont réussir à travailler avec la chambre d’agriculture. Des montages financiers via la Région Languedoc Roussillon vont permettre de faire aboutir des dossiers. Les premiers paysans (et paysannes !) s’installent au cours des années : deux maraîchers, un éleveur caprin et sa compagne transformant leur lait en fromage, deux apiculteurs, un ovin viande… et d’autres sont encore en préparation ! Ensemble, paysans et citoyens de la commune, mettent même en place un marché paysan. Dans un premier temps estival, ils ont réussi à le pérenniser sur l’année.

Maxime Pigache, ancien animateur ADEAR a œuvré à cette réussite. « Au début, dans les années 2000, la chambre d’agriculture ne voyait pas toujours d’un très bon œil le travail de l’ADEAR. Au cours de cette décennie, ils nous ont d’abord perçu comme illégitimes, puis légitimes mais concurrents. Mais avec le temps, nous avons fait nos preuves, mené nos combats et nous sommes arrivés à nous faire accepter et même reconnaître ! Nous sommes devenus aujourd’hui complémentaires et même partenaires privilégiés sur certains projets. Nous avons aussi su saisir la SAFER pour débloquer le dossier de la propriété libérée sur la commune.»

Une dizaine de nouveaux paysans sur un seul village ! Pour Christian, c’est normal. Il y a 38 000 communes en France. « Je ne comprends pas que les autres n’en fassent pas autant » déplore t-il. A l’échelle du Lot, ce serait plusieurs centaines voire milliers de paysans supplémentaires.

Soulatge mairePhoto : Christian Casties, maire de Soulatgé

Alors tout est parfait là-bas ? Tous n’ont pas réussi, certains sont repartis. « Il faut savoir, nous dit Christian que les gens du coin qui cultivent la terre depuis si longtemps ne voient pas toujours d’un bon œil des jeunes d’origine urbaine qui arrivent avec des idées bien arrêtées. La terre, c’est une histoire sacrée, ce sont les ancêtres qui l’ont défrichée. » Le maire est en effet originaire de la commune. Il connaît son histoire, mais a voulu transmettre sa connaissance de son pays à des « étrangers ». Rainer est sans doute le plus emblématique de ces nouveaux paysans. Originaire de l’Allemagne de l’Est, il est le symbole de ces néo-ruraux désireux d’une installation progressive.

Maxime avait encore un message à nous faire passer. « C’est parti d’une volonté politique forte, une équipe qui n’a pas baissé les bras. A chaque fois qu’un jeune venait voir le maire, Christian nous l’envoyait. L’ADEAR, ce n’est pas qu’une association qui aide à l’installation, ce sont aussi des formations, une mise en réseau et une courroie de transmission vers une agriculture paysanne. »

Ce qui est possible dans cette commune l’est aussi dans d’autres et donc dans la vôtre. En consultant votre maire, s’il vous répond « Faut voir » « Y’a pas grand-chose » ou « Non un maire ne peut rien faire, voyez avec la chambre », sachez qu’il n’est pas encore prêt, c’est le moins qu’on puisse dire. Montrez-lui l’exemple de Soulatgé, petite commune rurale de 200 habitants, comme bien d’autres… Cela le fera réfléchir autrement.

 

Article publié dans le LEA de février, à se procurer en kiosques ou sur le site en version pdf.

 

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